Ne nous plions pas aux sermons d’Arthus-Bertrand et de Nicolas Hulot

Posted on : 01-01-2010 | By : vincent | In : Les propos du vieux toubib

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Les vrais pollueurs par Jacques Franck.

Depuis quelques années, avec une intensité et une fréquence croissantes, nous sommes montrés du doigt, accusés, stigmatisés, voués à la vindicte des honnêtes gens, désignés comme les assassins de la Terre, comme les instigateurs d’un génocide à l’encontre des générations futures. Qui ça, nous ?
Nous, les pas écologiquement corrects, qui ne nous plions pas aux sermons des grands prêtres de la pureté universelle : les Arthus-Bertrand, les Nicolas Hulot, les vertueux de l’environnement, les gouvernements taxeurs de carbone.
Nous, qui persistons à ne pas avoir honte de conduire nos autos, à nous chauffer quand il fait froid, à nous laver les mains et les dents, qui poussons même l’incivisme à tirer la chasse d’eau quand nous le jugeons nécessaire. Nous qui mangeons de la viande parce que nous aimons ça, sans penser aux tonnes de carbone que coûte une côte de bœuf ni aux trois milliards de futurs habitants de la Terre qui, nous dit-on, claqueront du bec dans cinquante ans du fait de notre égoïsme.
Nous, qui récusons le programme de “décroissance” que les fanas de la fausse écologie proposent, en alternative à une espérance de mieux-vivre pour la majorité de ceux qui vivent mal et sous-consomment.
Nous, qui aspirons à une société libre, fraternelle, juste, dégagée de l’exploitation et de la domination d’un capitalisme prédateur qui nous prêche les restrictions, les privations (et pourquoi pas, l’abstinence…)
La pollution de la planète, elle existe. Je l’ai vue plusieurs fois. Exemples :
-La forêt amazonienne est un gigantesque poumon. Vue d’avion, des zones de pelade la parsemaient et en dégradaient la fonction vitale. Des groupes de l’agro-alimentaire brésilien voulaient substituer aux arbres des espaces dédiés à la culture et à l’élevage à des fins exclusivement mercantiles Les terres ne manquaient pas au Brésil, mais l’hectare de la grande forêt primaire et la main d’oeuvre indienne ne coûtaient rien. Je crois qu’il a été mis fin à ce processus.
-La mer d’Aral, en Asie centrale alors soviétique, était très poissonneuse. Elle entretenait une activité de pêche qui faisait vivre toute une population. Deux cours d’eau alimentaient cette mer intérieure.
Un de ces cours d’eau a été détourné afin d’irriguer des champs de coton en Ouzbekistan. Ces champs, gorgés d’eau ont dépéri. La mer d’Aral s’est asséchée. Les bateaux de pêche se sont échoués sur le sable du désert. Quant aux pêcheurs… J’ai survolé cette mer, qui n’en était plus une. J’ai vu un fantôme géographique. Un crime écologique.
-Autre survol, autres lieux. Le Cambodge, petit pays pauvre ravagé par les guerres et la dictature. Principale ressource, le Tonlé-Sap, immense lac intérieur et ses poissons. Ici encore, une déforestation visant à accroître les profits de certaines sociétés a bouleversé les conditions et le Tonlé-Sap va mal.
-En Louisiane (USA), la basse vallée du Mississippi, entre Bâton-Rouge et la Nouvelle Orléans, est baptisée l’”Allée du cancer”. Les villages sont démantelés, les paysans fuient, le bétail a une allure de tiers-monde; Le sol est pourri. Les crues du fleuve, l’infiltration de ses eaux dans le sol ne suffisent pas à rendre compte de cette catastrophe chronique impressionnante. Mais l’implantation dense de complexes pétroliers et pétrochimiques géants, leurs effluents aériens et souterrains transforment la “riante Louisiane” en enfer inimaginable.
Mes témoignages ne constituent qu’un minuscule échantillonnage, à peine probant. Il suffit d’ouvrir les yeux et les oreilles pour alimenter le dossier de la pollution mercantile (les centrales allemandes au charbon, les mines chinoises, les pétroliers qui dégazent en mer, les sites indiens de démantèlement de vieux navires, les gisements de sables pétrolifères canadiens, Bhopal et l’ “Union Carbide”, et tant d’autres).
Alors ? Faut-il renoncer à tout progrès industriel, revenir “à la lampe à huile et à la marine à voile” ?
Bien sûr que non. Au contraire. L’exploitation des richesses de la Terre, le développement et la mise en œuvre de découvertes et de technologies nouvelles sont des perspectives exaltantes. A condition qu’elles se fassent sous le contrôle des peuples et à leur profit.
La planète sera propre si on la débarrasse des implications mercantiles du progrès. Pas de véritable écologie sans bonne politique. Et pas avec des bateleurs d’estrade, des ministres démagogues, des hommes de bourse et de banque.

Jacques FRANCK, Premier janvier 2010

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