Le prêt à la Grèce

Posted on : 04-05-2010 | By : vincent | In : Les propos du vieux toubib

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Le chanoine, les Grecs et les marchés par Jacques Franck.

Après d’être concerté avec Madame Angela, une femme de bien dont la philanthropie n’a d’égal que son dévouement à la prospérité des marchés financiers, le chanoine-président des bons Français rentra en lui-même et réfléchit longuement.
Lorsqu’il en sortit, illuminé par ce qu’il y avait trouvé, il convoqua sa cour, ses vizirs et ses thuriféraires. Afin de donner une dimension supplémentaire à son propos, il fit rehausser ses talonnettes et grimpa sur un tabouret.
“Nous, Européens, nous ne pouvons laisser dans l’embarras la nation de Platon, Thémistocle, Homère et Nana Mouskouri. L’Histoire, la Morale et la Solidarité nous enjoignent de tout faire pour protéger de la banqueroute des institutions bancaires qui font la gloire du monde libre. Le peuple, que dis-je, le peuple! La populace d’Athènes, Thessalonique et autres lieux s’est fourvoyée dans une vie de délices et d’irresponsabilité ? Eh bien ! nous les ramènerons au Devoir, au Mérite, à la Vertu. Moi, apôtre de ces valeurs (et de celles de la Bourse), j’ai décidé :
- Nous octroyons généreusement à la Grèce un prêt d’environ 16 milliards d’euros, dont 4 ou 5 pour l’année en cours. Comme on n’a rien pour rien, nous lui proposons – plutôt lui imposons – un taux d’intérêt de 5 %. Mais, me direz-vous (ou ne me direz pas, car ma parole n’appelle pas de contestation), où prendrez-vous ce bon argent ?
- Il ne nous coûtera rien, bien au contraire. Nos amis des Marchés (il s’inclina), nos féaux du CAC 40 se feront une joie de nous les prêter avec un taux de 3 % ! Rien que la première année, nos largesses nous rapporteront environ 160 millions d’euros !
Voilà un bel exemple de charité à l’européenne !”
“Et les Grecs ?” osa demander quelqu’un.
“Les Grecs ? Ils verront leurs salaires baisser, leurs retraites ramenées à la portion congrue, ainsi que l’ensemble de leur système social ( exemple à méditer), leurs impôts augmenter, leurs fonctionnaires, ces budgétivores, renvoyés chez eux. Bien sûr, leur admirable patronat et leurs banques n’auront pas à payer pour les errements de leurs citoyens !”
Tout le monde applaudit cet élan de solidarité. Même les socialistes. Seuls les communistes manifestèrent leur réprobation.

Jacques FRANCK 4 mai 2010